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Livre III.
 

Livre II.
 
La Flûet et la Fauvette
Chien et Chat
L'Homme et le Baudet
Le Loup et l'Agneau
Les Tiroirs de ma commode
Le Casque et le Bonnet de coton
La Charmille et la Bergère
L'Habit et la Chemise
Le Chat et la Souris
Le Lièvre et la Grenouille
La Carafe et le Verre
L'enterrement d'un Rat de qualitè

Fable I.
La Flûte et la Fauvette

Prima donna d'un frais bocage,
Dame Fauvette, l'autre jour,
Pour charmer les soins du ménage
Modulait un hymne d'amour.
A sa joyeuse chansonette
Le voisinage applaudissait,
On criait: bis! et la Fauvette
Complaisamment recommençait.

Une Flûte, oubliée en ce lieu solitaire,
Blâmait des louangeurs l'unanime transport,
Et contraignant enfin la chanteuse à se taire,
S'efforça de prouver dans un long commentaire
Qu'en approuvant l'oiseau l'auditoire avait tort.
»Venez entendre, disait-elle,
Les accords merveilleux qu'enfante l'Opéra,
Et nul de vous n'applaudira
Cette champêtre villanelle
Que votre mauvais goût jusqu'alors admira.
Aujourd'hui cependant je veux quemon génie
Fasse revivre ici quelques-uns des accens
Ravissans
Que ma voix sait mêler aux masses d'harmonie.
Flatter l'oreille est mon emploi:
Écoutez-moi!«

Au milieu d'un profond silence
On l'écoute en effet, mais on l'écoute en vain:
La Flûte n'avait là le souffle ni la main
Qui faisaient toute sa science,
Et ne put à l'appui de sa fière éloquence
Trouver le plus simple refrain.
Chacun railla son ignorance.
»Madame, lui dit un Pinson,
Grand merci de votre leçon!
Vous êtes je le crois, fort habile en musique,
Mais je n'entends, hélas! rien à votre chanson,
Et lui préfère encor cette idylle rustique
Que tantôt notre sœur fredonnait sans façon.«

La Flûte orgueilleuse est l'emblême
De cet intrépide parleur
Qui s'adjuge entre tous un mérite suprême,
Sans rien produire de lui-même:
Son Apollon est un souffleur,
Et le talent d'autrui fait toute sa valeur.

Fable II.
Chien et Chat

Le bonhomme Géronte avait dans sa demeure
Un Chien, bel épagneul, un Chat, bel angola,
Mais qui se détestaient; et leur maître, à toute heure,
Entre eux s'interposait pour mettre le holà.
»Mes amis, disait-il, pour moi de la vieillesse
Par vos débats sans fin vous affligez le cours:
Quand je porte à tous deux une égale tendresse,
Ne pouvez-vous au moins en paix passer vos jours?
Aimez-vous donc un peu, c'est moi qui vous en prie!
Raton, ne griffez plus; ne mordez plus, Zéphyr...
Quoi!... vous vous caressez?... Pour mon cœur quel plaisir!...
Allons, pardonnez-moi ma triste gronderie:
Charmans petits amis, voyez mon repentir.«
Et toujours , en faisant cette étrange prière,
Le bonhomme Gérante cssuyait sa paupière.
Un jour, qu'il remplissait son pacifique emploi,
Arrive un sien valet tout haletant d'émoi:
»Monsieur! fit-il, Monsieur! hâtez-vous, venez vite!
Votre fils, votre bru sur l'heure se sont pris
De je ne sais quelle fureur subite
Qui les pousse à se battre en jetant de grands cris! —
A se battre, mon Dieu! mais tant pis! mais tant pis!
Cours leur dire en mon nom qu'ils cessent ce tapage,
Et que je leur défends de plus agir ainsi.
Mais moi, tu le sais bien, j'adoptai pour usage
De ne jamais entrer aux détails du ménage,
Et j'ai bien autre chose à démêler ici!«
L'impassible vieillard, en parlant de la sorte,
Mettait stoïquement le valet a la porte,
Puis rendu tout entier à son Chat, à son Chien,
Renouait avec eux son touchant entretien.

Tels de ces gens si bons, que l'on voit se complaire
Dans la félicité de leurs chiens, de leurs chats,
S'il faut de leur semblable alléger la misère,
Pour lui souvent ne feront pas
Un pas!

Fable III.
L'Homme et le Baudet

»Qui de nous deux est le plus sot?
(Demandait tout à lheure un Baudet à son maître.)
Querellant le Destin, maudissant votre lot,
Vous voyez sans bonheur les jours fuir et renaître:
Cependant que soumis aux caprices du sort,
Et des biens et des maux acceptant l'alliance,
J'abandonne au hasard ma docile existence:
L'aurore en paix m'éveille, en paix la nuit m'endort.
Si d'injustes mépris vous m'imposez l'outrage,
Utile serviteur je me sens consolé:
Si d'un brutal courroux tombe sur moi l'orage,
Je cède à la tempête et n'en suis pas troublé.
Vous cherchez des palais la bruyante allégresse,
Je cherche le repos à l'ombre d'un ormeau:
Vous aimez des festins la somptueuse ivresse,
J'aime l'herbe des prés qui fleurit au hameau.
Vous quittez en tremblant une vie éphémére:
Sans crainte je m'en vais... ma foi! je ne sais où...
La mort vous frappe, et, noble fou,
De l'immortalité vous rêvez la chimère!
Moi, quand la faux du Temps vient trancher mon licou,
L'avenir ne m'importe guère.
Et maintenant, vous me direz, j'espère,
De vous savant docteur, de moi pauvre idiot,
Lequel des deux est le plus sot.«
Ici maître Baudet termina sa boutade. —
Et que répondit l'Homme? — Il ne répondit rien,
Mais jura de punir l'insolente incartade,
Et ce serment fatal fut accompli trop bien;
Empruntant d'un bâton l'énergique éloquence,
Et lançant d'un bras ferme une lourde oraison,
Il prouva largement qu aux yeux de la puissance
Le faible a toujours tort t'oser avoir raison.

Simple argument, trop prompt à nous confondre,
Vient-il par fois dévoiler notre erreur?
Nous voilà pris d'orgueilleuse fureur:
Mais se fâcher n'est pas répondre.

Fable IV.
Le Loup et l'Agneau

Un fils de Robin-Mouton
S'ennuyant de la tutelle
D'un chien sévère et fidèle,
Seulet s'en alla, dit-on,
Cueillir aux champs l'herbe nouvelle.
Survint messire Loup, dont l'appétit glouton
Convoitait l'innocente proie.
»Notre féal, dit-il, mon âme est toute joie!
Cet incommode Argus, dont la brutalité
Du joug de son caprice accablait ton jeune âge,
Par ton heureuse audace enfin est écarté.
Le ciel en soit béni! Sous ce riant ombrage
Tu pourras désormais promener tes loisirs,
Et de tes amoureux désirs
Instruire sans témoin les échos du bocage.
Mais, guidés vers ces lieux par ton lâche oppresseur,
Peut-être les tyrans, irrités de ta fuite,
Vont de la liberté te ravir la douceur:
Ami, sous mon toit protecteur
Viens braver leur poursuite
Et goûter le bonheur!«
A ces mots, il l'entraîne en la forêt profonde.
Hélas! et depuis lors le pâtre du hameau
En vain l'appelle sous l'ormeau;
Il n'est à ses accens plus d'agneau qui réponde...
Dans ces bois l'imprudent n'a trouvé qu'un tombeau.

Mon dessein se découvre en cette allégorie.
La jeunesse, rebelle aux leçons d'un censeur,
Obéit en esclave au vice adulateur,
Et, suivant à grands pas une route fleurie,
En rêvant le plaisir arrive à la douleur.

Fable V.
Les Tiroirs de ma commode

Dans les tiroirs de ma commode
Un peu de linge est en ordre rangé.
Ce meuble d'ordinaire est faiblement chargé:
L'opulence chez moi ne fut jamais de mode.
Quelquefois cependant sans façon l'amitié
De mon étroit logis emprunte la moitié,
Et donne à mes tiroirs certain air de richesse.
Or, je crois ces messieurs portés a la paresse,
Car se voyant remplir l'un d'eux s'est écrié:
»A tes amis prête assistance,
Maître, dest bien, très-bien! pour ma part, j'y consens.
Mais que ce soit à nos dépens,
Maître, c'est mal, très-mal! et je fais résistance!«
De ce tiroir mutin je punis l'insolence.
Néanmoins son discours, j'en conviens aujourd'hui,
N'était pas tout à fait dépourvu de justice:
Bien des gens empressés à vous rendre service
Ne font rien par eux-même et font tout par autrui:
Chacun prend volontiers l'obligeance pour lui,
Et laisse à son voisin le soin du sacrifice.

Fable VI.
Le Casque et le Bonnet de coton

Le casque enorgueilli de sa riche crinière,
De sa mouvante aigrette et de son cimier d'or,
Fier aussi d'avoir vu dans la lice guerrière
Les braves applaudir son intrépide essor,
Un jour, dans les loisirs d'un repos salutaire,
Eut pour voisin, dit-on,
Le Bonnet de coton,
Personnage fort doux et d'humble caractère.

»Qui te rend si hardi d'oser auprès de moi
Étaler sottement ta bourgeoise indolence?
As-tu donc oublié que jamais la vaillance
Ne s'estime assez loin d'un poltron tel que toi?
On reconnaît le Casque à cette violence
(Répliqua sans courroux le Bonnet tout surpris).
Mais devrait-il payer par d'offensans mépris
Ma fraternelle bienveillance? —
Bienveillance de lâche est injure à mes yeux!
Cependant laisse là ta paresse chérie:
Moissonnant avec moi des lauriers glorieux,
Viens aux champs de l'honneur défendre la patrie,
Et je suis ton Pylade, en tous temps, en tous lieux! —
Grand merci, mon voisin, répondit le classique:
Je me sens peu de goût pour les exploits guerriers:
Le ciel, qui vous dota d'une ardeur héroïque,
En me faisant tout pacifique,
M'invite à préférer le duvet aux lauriers.
Sans peine j'obéis; et tandis que les larmes,
Le ravage et la mort ont pour vous tant de charmes;
Tandis qu'avec plaisir vous voyez les humains,
Nourrissant les fureurs d'une rage homicide,
De fer armer leurs bras, de sang teindre leurs mains,
Et des foudres de Mars guider le vol rapide;
Moi, spectateur prudent de plus heureux combats,
J'accompagne l'amant conduit par le mystère,
Qui va joindre sans bruit lamante solitaire;
Et, discret protecteur de leurs tendres débats,
Des maux que vous causez je console la terre...«

Sans doute le Bonnet, dans un pompeux discours,
Donnant libre carrière à sa docte éloquence,
S'en allait exalter sa bénigne importance,
Et citer à témoin le rhume et les amours,
Quand du maître commun l'oppurtune présence
Vint à nos deux rivaux prescrire le silence.
»Je vous blâme, dit-il, et vous loue à la fois.
Lorsque chacun de vous s'honore d'être utile,
De la saine raison vous écoutez la voix:
Mais d'un mépris jaloux quittez l'orgueil futile.
Nature, par de sages lois,
Pour les êtres divers créa divers emplois:
Toi, Casque belliqueux, brille au sein du carnage;
Toi, Bonnet innocent, dans l'ombre règne en paix:
Et comme a dit un vieil adage,
Rois, commandez dans vos palais,
Bergers, commandez au village.
Le monde en ira mieux, je gage.«

Fable VII.
La Charmille et la Bergère

»Arrête, Bergère cruelle!
Pourquoi ravir dans leurs berceaux
Ces fruits d'amour que Philomèle
A confiés à mes rameaux?

Ne sens-tu pas quelle douleur amère
Peut lui causer la perte de ses fils?
Cet oiseau qui gémit, cruelle! est une mère!
Elle mourrait sans ses petits.

Quelques printemps encore, et, comme Philomèle,
Tu deviendras mère à ton tour:
Puisses-tu ne jamais te voir ravir, comme elle,
Ces tendres gages de l'amour!

Mais tu pleures, Bergère... Eh bien! sous mon feul'
Remets ce modeste berceau:
Il est si doux d'être bonne à ton âge,
Même envers un oiseau!«

Fable VIII.
L'Habit et la Chemise

Prise d'envieux dépit,
Une orgueilleuse Chemise
Voulut jadis sur l'Habit
En évidence être mise.
Le maître s'y refusait,
Et très-sensément disait
Que l'habituel usage
A ce désir s'opposait.
Bien qu'il parlât comme un sage,
La chemise en son langage
D'injustice l'accusait,
Et plus il moralisait
Plus elle faisait tapage.

Enfin il fallut céder
A sa jalouse exigence;
A quitter la préséance
L'Habit dut se décider:
Mais il goûta sans tarder
Les charmes de la vengeance;
Car dans une foule immense
Ayant été parader,
La Chemise put entendre
Sur elle de toutes parts
Fondre sifflets et brocards:
Ce fut vraiment un esclandre!
Tant et si bien qu'au logis
Elle rentra fort confuse,
A l'Habit faisant excuse
D'un ton modeste et soumis.
Tout dans l'ordre fut remis.

Que l'imprudent s'embarrasse
De projets ambitieux,
Le sage reste à la place
Que lui marquèrent les dieux.

Fable IX.
Le Chat et la Souris

Un Chat allait croquer une jeune souris;
Déjà d'un bras nerveux il serrait la pauvrette:
Celle-ci lui disait à voix humble et doucette:
»Monsieur de Raminagrobis,
Quels sont mes torts vers vous? quels envers vos amis?
A peine de la vie ai-je entrevu l'aurore,
Et ma dent n'a pas même encore
Blessé le lard de ce logis.
Ah! si je vous ai fait injure,
Mon cœur n'en sut rien, je vous jure.
Grâce, grâce, Monsieur de Raminagrobis! —
Mon enfant, dit le Chat, en rien je ne t'accuse.
Je t'estime et te tiens pour honnête animal.
Je n'entends, crois-le bien, te punir d'aucun mal:
Mais je veux te croquer, parce que...ca m'amuse.«

Ainsi nous prenons à plaisir
D'opprimer la faible innocence:
Vainement sa douceur essaie à nous fléchir,
Nous sommes sourds à la clémence.

Fable X
Le Lièvre et la Grenouille

Une Grenouille fort craintive
Habitait d'un marais les tranquilles roseaux:
Si parfois en silence elle hantait la rive,
Au bruit le plus léger elle criait: »Qui vive?«
Puis se replongeait sous les eaux.
Un Lièvre, autre poltron, près d'elle avait son gîte:
Les tourmens de la peur, les tourmens de l'ennui,
Hôtes de ce logis, y veillaient avec lui,
Et pendant son sommeil le malheureux ermite
Des songes effrayans recevait la visite:
Contre tant de terreurs il cherchait un appui.
Notre héros, notre héroïne,
Dans l'herbe verdoyante égayant leurs esprits,
Face à face un matin se virent, tout surpris:
Le pèlerin, la pélerine
Eurent si grand émoi qu'ensemble ils furent pris
D'un mal qu'aisément l'on devine.
Cela calmant un peu l'excès de leur frayeur,
Le Lièvre à demi-voix dit: »Bon jour, ma commère.«
La Grenouille tout bas dit: »Bon jour, mon compère. —
Il paraît que de moi vous avez eu bien peur? —
Et que je vous ai fait une rude épouvante? —
Ma foi! oui, j'en conviens. — Eh bien! moi, je m'en vante. —
Il me vient une idée! Écoutez-moi, ma sœur.
Vous tremblez bien souvent, et bien souvent je tremble:
Si nous nous rapprochions? L'un à l'autre, il me semble,
Nous saurions quelque peu de courage inspirer
Lorsque de nous l'effroi se voudrait emparer —
Par Neptune! voisin, votre avis est fort sage!
Frappez là! Désormais nous n'avons qu'un ménage
Près de vous je me sens une intrépidité
Qui pare ces vallons de nouvelle beauté!
Voulez-vous voyager? Je suis votre compagne. —
Moi, votre compagnon, de vous suivre enchanté! —
En campagne, voisin! — Ma voisine, en campagne!«
Et les voilà partis. Le voyage fut court.
»Ma sœur, entendez-vous? — Quoi, mon frère? —Un bruit sourd,
Qui paraît s'avancer du fond de ce bocage. —
Qui, vraiment! — Sauvons-nous! — Frére, sur cette plage,
Je voudrais bien savoir... — Quoi donc, sœur? — Quelle mein
A changé, depuis ce matin,
De ces mille cailloux l'ordinaire assemblage. —
Vous croyez? — J'en suis sûre. — Alors fuyons par là! —
Chut! n'avancez pas! — Qu'est cela? —
Je crois voir... — Achevez! — Un œl qui nous regarde! —
Un œl! Sauve qui peut! et que le eiel vous garde!«
Ayant ainsi parlé, loin, bien loin de ces lieux
Chacun détale à qui mieux mieux.

Deux lâches réunis n'ont pas plus de vaillance:
Au poltron joignez le trembleur,
Et de cette triste alliance
Vous n'obtiendrez que double peur.

Fable XI.
La Carafe et le Verre

La Carafe allait versant,
Le Verre allait s'emplissant,
Si bien que l'onde enfin s'ècoula sur la terre.
»Au diable le nigaud! Peste soit du butor!
(S'écria la Carafe apostrophant le Verre:)
J'épanche dans son sein mon liquide trésor,
Et le rustre sur la poussière
Laisse perdre un cristal qui me rendait si fière!«

Témoin de son courroux, certain sage lui dit:
»La faute en est à vous, ma chère:
Amitié, faveur et crédit
Trop prodigués n'ont plus qu'une valeur légère.
Mesure en tout est nécessaire.«

Fable XII.
L'enterrement d'un Rat de qualitè

Un Rat qui fut vingt ans l'élu de la victoire,
Et dont le nom brillant de gloire
Eut pour écho tout l'univers;
Un Rat qui réduisait les matous en servage,
Rat de profond génie et de bouillant courage,
Trahi par les destins mourut dans les revers.

Tous ceux qui l'adoraient au temps de sa puissance,
Tous ceux qu'on avait vus mendier sa faveur,
Tous ceux dont il faisait la force et le bonheur,
L'abandonnèrent sans défense
Quand son front se courba sous la main du malheur.

Captive des vaincus, sa triste sépulture
Gisait loin du vallon qu'il avait tant aimé.
Il semblait oublié de toute la nature:
A peine quelques Rats, innocens de parjure,
Gardaient son souvenir dans leurs cœurs renfermé.
Un caprice du sort enfin dans sa famille
Ramène triomphans ses illustres débris:
On verse alors des pleurs, on jette alors des cris,
Autour de sa cendre on fourmille,
On redit ses bienfaits, on redit ses travaux,
On les célèbre en vers, on les célèbre en prose,
Vingt panégyriques nouveaux
Du héros chaque jour dressent l'apothéose;
Et remarquons un fait dont je tairai la cause,
Pour louer le défunt les ingrats d'autrefois
Dans ce noble concert haussent le plus la voix!....

A l'aspect de ces funérailles,
Un Chat que bien souvent on vit dans les batailles
Du guerrier valeureux affronter le courroux,
Disait en contemplant ce sublime tapage:
»Pensent-ils aujourd'hui par un tardif hommage
Dérober cette proie au sépulcre jaloux?
Ils auraient fait bien mieux, imitant sa vaillance
Quand sur lui se ruait notre Sainte-Alliance,
De le défendre de nos coups!«

Mais ne serez-vous pas, Messieurs, tentés de croire
Qu'au lieu d'un conte mensonger,
Je viens d'écrire ici, sous un titre léger,
Une page de notre histoire?